EXPO | Dinh Q. Lê au Quai Branly

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L’artiste

Dinh Q. Lê est un artiste américano-vietnamien né en 1968 à Hà Tiên, village vietnamien situé près de la frontière cambodgienne. La guerre éclate entre le Vietnam et le Cambodge alors qu’il a seulement 10 ans. Les Khmers rouges débarquent dans la région dans laquelle il vit avec sa famille, qui décide de s’enfuir.

Lê, sa mère et ses six frères et sœurs ont tenté de prendre un bateau en direction de la Thaïlande, mais certains des membres de la fratrie n’ont pas pu arriver au bout du voyage. Ils séjournent quelques temps en Thaïlande, avant de traverser l’océan pour s’installer à Los Angeles.

Plus tard, il obtient un Bachelor of Fine Arts en photographie à l’Université de Californie à Santa Barbara. Démarre alors sa carrière d’artiste.

Lê commence à tisser ses photos, inspiré par les leçons de tissage de nattes reçues par sa tante lorsqu’il était enfant. Il est par la suite diplômé d’un MFA à la School of Visual Arts de New York.

Dans les années 1990, il retourne vivre au Vietnam à Hô Chi Minh et crée le centre Sàn Art, qui est la plus importante structure d’art contemporain du pays.

Son travail se compose donc de tissages de photos, mais également de vidéos, de sculptures et d’installations, et sa carrière est internationale.

Son art

Une des techniques phares de Dinh Q. Lê est le tissage de photos, qui lui permet de créer des montages à grande échelle. Il superpose ainsi deux images qui s’entremêlent, et un ruban de lin est plaqué sur les bords. Cette technique de tissage est apparue assez tôt dans sa carrière, et est directement issue de la façon dont sa tante tressait des nattes. C’est ce tissage qui apporte une double-lecture des images, et un motif singulier.

Son art se nourrit de tragédies, comme le génocide mené par le régime khmer rouge au Cambodge et au Vietnam, ou les migrants ne parvenant pas à traverser la Méditerranée, mourant ainsi en mer.

Dans une autre série intitulé Light and Belief, Dinh Q. Lê confronte l’histoire du Vietnam avec l’image stéréotypée et presque hollywoodienne que peuvent en avoir les Occidentaux, notamment les Américains.

Il joue ainsi avec ces images pour faire passer des messages, la photographie occupant une place majeure dans son art ; il ne prend pourtant aucun cliché, et réutilise plutôt des photos marquantes déjà existantes afin de leur donner un nouveau sens. Certaines images sont d’ailleurs déjà bien connues à travers le monde, étant issues de certains films ou de moments historiques comme « La fille au napalm », qui représente une fillette nue qui court sur une route sur laquelle une bombe au napalm vient de tomber, prise en 1972.

D’ailleurs, l’idée de « rendre la parole » est centrale à son travail. Il a pu se rendre compte, notamment lors de ses études aux États-Unis, que les voix des Vietnamiens étaient minoritaires, surtout en ce qui concernait la représentation de la Guerre du Vietnam. Il a justement pu donner la parole aux Vietnamiens via une pièce intitulée Light and Belief: Sketches of Life from the Vietnam War (2012), composée de dessins d’artistes engagés sur le front, et d’une collecte de paroles retransmises en vidéo.

L’exposition

Dinh Q. Lê a été exposé au Musée du Quai Branly Jacques Chirac du 8 février au 20 novembre 2022. Cette exposition, intitulée « Dinh Q. Lê, Le fil de la mémoire et autres photographies », prenait place dans la galerie Marc Ladreit de Lacharrière, espace réservé à l’histoire des arts non occidentaux. Selon les mots de Christine Barthe, commissaire de l’exposition, l’idée était de proposer une forme de rétrospective du travail de Dinh Q. Lê, peu connu en France.

Parmi les œuvres exposées, on retrouve des tissages impressionnants, mêlant parfois images de film et images historiques, certaines en noir et blanc, d’autres aux couleurs bien plus intenses. Il y a également la pièce Light and Belief: Sketches of Life from the Vietnam War évoquée plus haut, composée de dessins de différents artistes et d’une vidéo qui rassemble leurs interviews, ce qui donne une perspective nouvelle sur la guerre du Vietnam.

Une autre œuvre marquante est Adrift in Darkness, que vous pouvez voir ci-dessus, des blocs gris semblables à des astéroïdes flottant dans l’air. Il s’agit du premier (et probablement dernier) tissage en trois dimensions de Dinh Q. Lê. Elle est cette fois-ci inspirée des techniques japonaises de tissage, utilisées pour la vannerie. Les images utilisées sont un mélange de photos des Printemps Arabes, mais aussi de manifestations des années 1960 en Europe au sujet de la guerre du Vietnam et de migrants essayant de traverser la Méditerranée. Ces « rochers » sont très légers, et donc en mouvement dès qu’un visiteur passe, car Dinh Q. Lê voulait transmettre cette impression de dérive, et une obscurité nous empêchant de savoir où nous allons. Ils font aussi, et surtout, référence aux mouvements migratoires et aux personnes dérivant au beau milieu d’une mer sombre, et tentant d’atteindre un avenir meilleur.

En bref, j’ai adoré cette exposition et je suis admirative du travail de l’artiste ! Je vous laisse sur cette vidéo du Musée du Quai Branly, dans laquelle Dinh Q. Lê présente son travail.

Douces effrontées

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